Le 29 mars dernier s’est tenu à Villejuif un colloque sur les proches aidants, à l’initiative de Cancer Contribution et avec la mobilisation de 22 associations dont Patients en Réseau. Interview de Sandra Doucène, directrice de Cancer Contribution. 

 

Quelle est la genèse de ce colloque ? 

Elle se retrouve dans le carnet d’idées citoyennes de Cancer@dom ® où une des 10 propositions pour dynamiser le virage de l’ambulatoire était axé sur les proches aidants. Ce virage a généré une délégation de tâches pour le soin à domicile, dont le proche aidant se retrouve responsable.  

 À la suite de ce travail, nous nous sommes rendu compte que malgré ces recommandations, ce sujet avait du mal à percer contrairement à d’autres pathologies. Dès 2019, nous avons mis en place des actions concrètes avec d’abord un colloque auprès des organismes privés et publics pour sensibiliser sur le vécu et les besoins des salariés qui font face au cancer d’un proche. Les conclusions étaient très claires. Le cancer n’était pas perçu par les employeurs comme une maladie dont les aidants étaient impactés dans leur quotidien contrairement à d’autres maladies neurodégénératives par exemple perçues comme plus génératrices de perte d’autonomie ou de handicap. Nous savons pourtant très bien que le cancer provoque des répercussions sur les proches. 

 

Qu’avez-vous fait de ce constat étonnant ? 

Nous avons initié des actions à différents niveaux pour être au plus près des proches, notamment à l’hôpital à travers une brochure et des informations sur notre site et sur les réseaux. Nous avons aussi accompagné et encouragé des projets dans des régions pilotes comme en Aura avec des événements de réflexions pluridisciplinaires.1 

Et surtout, nous avons lancé, fin 2021, un baromètre pour mieux comprendre leurs besoins, leurs rôles, avec 22 associations partenaires et 6 centres hospitaliers d’Ile-de-France. Nous avons touché plus de 400 répondants et 287 exploitables. Patients en réseau a d’ailleurs été particulièrement actif et je les remercie. Grâce à la mobilisation de tous, nous avons réussi à avoir une diversité de profils en termes de pathologies et socio-économiques. 

 

Avec quels résultats ? 

90 % des répondants avaient un proche atteint d’un seul cancer et 10% en avaient plusieurs. 14% des répondant étaient proches de personnes ayant un cancer du poumon, 21% d’un cancer du sein et 4% d’un cancer du côlon ou du rectum. Dans 96% des cas, la personne qui a répondu était un membre de la famille et 66% vivaient avec la personne. 

Deux chiffres sont principalement à retenir, 85% des personnes n’ont pas été informées des aides et soutiens qui pouvaient les aider dans leur rôle d’aidant ! L’autre chiffre vient en partie contrebalancer cela : 61% des proches disent que le cancer ne prend pas le dessus sur leur relation avec le patient. Cela démontre une force et une grande résilience des proches par rapport à l’impact du cancer. D’ailleurs, si 79% connaissent la notion d’aidant, ils ne se l’appliquent pas forcément à eux-mêmes. 

En fait, les proches aidants ne sont pas forcément identifiés par le système médical, par les différentes instances. Ils ont très peu d’informations mais arrivent malgré tout à faire face et à faire que la relation avec leurs proches reste une relation aimante sans que le cancer ne prenne le dessus. 

À travers ce baromètre, nous avons voulu mieux comprendre les éléments les plus difficiles à gérer pour les proches aidants pour pouvoir déterminer les actions à mener avec les associations et les centres hospitaliers partenaires. La première étape étant de mieux identifier les 49% de proches qui sont particulièrement impactés dans leur quotidien selon le baromètre. 

 

Il s’agit d’un des objectifs du colloque ? 

Oui, de travailler tous ensemble sur ce repérage. Comment faire pour leur amener l’information utile et les soutiens disponibles sur leur territoire. Nous avons centré les discussions sur les 3 moments les plus difficiles : l’annonce, quand les soins s’invitent à domicile et l’entrée en soins palliatifs avec la gestion de la douleur. Nous avons moins parlé de la fin de vie en tant que telle. Les membres des 3 ateliers mélangeaient professionnel médecins, paramédicaux, médico-sociaux, associatifs, patients et proches.  

Un gros travail de recensement des ressources, des acteurs, notamment associatifs a été mené. Il a aussi beaucoup été question de la notion de temporalité : quand informer efficacement ? En moyenne, 8 idées citoyennes sont ressorties de chaque groupe.  

Un rapport va sortir au mois de juin pour aller au-delà de ces idées citoyennes et définir les priorités d’action. Et je vous donne rendez-vous en 2023 pour le prochain colloque « Face au cancer, agir ensemble », même lieu, même format, mêmes acteurs pour faire le point et travailler ensemble sur les étapes suivantes.  

Les autres articles de MRCNews de Mai 2022